Paul - Hitchhiking from Canada to Colombia (2008-2009) & Mathieu - Living in Mexico (2008-2009)

Quelques 19 900km, en stop et en bus!


Afficher Itinéraire de Paul avec les légendes
31 octobre 2008

Tentative de record en autostop! (P)



Me voilà donc en route pour Boston. Première étape : passer la frontière! Elle n'est normalement qu'à une heure de Hamilton, mais je n'y arrive moi que vers midi, après quatre heures de stop. La frontière sépare la ville canadienne de Fort Erie de Buffalo, première ville étasunienne de part et d'autre du fleuve Niagara reliant deux des Grands Lacs. On la traverse sur un pont d'environ un mile, à pied ou en voiture. Faute de n'avoir pas trouvé de voiture, me voilà sur le pont seul avec tout mon attirail en train de traverser la frontière! Une bonne heure plus tard, je sors du bureau de douane, après avoir encore usé de patience et de diplomatie auprès de la suspicion systématique des douaniers à l'égard de nous-autres étrangers. La police est partout autours de l'endroit, et ceux à qui je parle m'interdisent d'aller faire du stop devant eux, alors que j'ai lu hier encore que tant qu'on ne franchit pas le panneau "interdit au piétons" le stop est légal. "C'était un article de loi brut, je vous jure!" Rien à faire...
Je marche donc à travers la ville pour aller rejoindre une bretelle non surveillée.
Buffalo ne compte plus que 300 000 habitants aujourd'hui, après avoir été huitième plus grande ville des Etats-Unis avec presque 600 000 habitants en 1950. Pour cause la délocalisation de ses plus grandes industries. Comme beaucoup de villes américaines, les communautés sont regroupées géographiquement. Je passe moi dans la parties habitée par les 8% d'hispanophones.
Le changement avec le Canada est immédiat, ne serait-ce que pour les drapeaux!
J'arrive un quart d'heure plus tard sur ma bretelle. Il ne faut que cinq minutes avant qu'une voiture ne s'arrête : pour une première expérience aux états-unis c'est plutôt pas mal. En fait, j'étais sois-disant près d'un quartier malfamé et ces gens ne voulaient pas m'y laisser seul! Ils ne vont pas loin mais me déposent sur la Highway 90 qui traverse tout l'état de New-York et celui de Massachusetts jusqu'à Boston. A partir de là la vraie partie commence : un seul camion ou une seule voiture peut aller très loin, peut-être même jusqu'à Boston! Mais mes attentes et exigences personnelles s'estompent au fur et à mesure que le soleil poursuit sa rapide chute vers l'horizon, alors que je peine à trouver mon tant attendu long courrier. Je passe finalement un coup de fil à Natasha, Boston ne sera pas pour aujourd'hui.
Après une demie heure de route avec un bon hippie, c'est un musicien qui s'arrête pour moi. Il est en route pour sa répète hebdomadaire à laquelle il me convie, avant de repartir un peu plus loin vers l'Est. Je prends!
Terry est batteur dans un groupe de rock chrétien! Petite prière avant et après la musique et paroles chrétienne font donc partie du show. Contre toute attente leur musique n'est pas mal du tout et selon lui ils organisent de très gros concerts gratuits dans la paroisse du coin. Il faut donc croire que ça a du succès ici. Une heure plus tard nous sommes en route pour l'Est, dans son camion. Terry est en fait plus routier que musicien... Et plus religieux encore que routier : on aurait dit un vrai colon missionnaire! Je supporte donc patiemment sans trop répondre son attitude exagérée presque commerciale par rapport à sa religion, d'ailleurs en désaccord avec ses vrais principes qui ressemblent en fait plus à ceux d'un fasciste... Lorsque qu'il me dépose à un "truck stop" à l'ouest de Syracuse, je suis presque à mi-chemin. Il fait nuit mais ce n'est pas trop tôt... pour le quitter!
Un "truck stop" -litérallement un arrêt de camion- est une station service spécialement conçue pour les routiers. Restaurant, chambres, jeux vidéo, cinéma, alimentation, douches, tout est là pour les divertir et leur offrir de quoi prendre leur pose obligatoire entre leurs énormes trajets. J'y passe la nuit à demander à chaque routier s'il va vers Boston, en vain. Vers 5h du matin après une sieste inconfortable sur un banc, je décide épuisé d'aller m'endormir sur un fauteuil du minicinéma. Pas moyen de fermer l’œil au final: le film (Wild Hogs) est prenant et raconte le périple de quatre motards à travers les états-unis. Après le film, un routier avec lequel je fume un clope me livre les secrets de la radio CB qu'ils utilisent pour prévenir les autres d'un radar ou pour se raconter des conneries. Ils ont bien sûr leur jargon et leur secrets, c'est excellent ! Il m'explique ensuite que la plupart des routiers travaillent pour une compagnie et n'ont pas le droit de prendre de passager sans autorisation. Les autres, selon lui, ont souvent peur de se faire égorger ou quelque chose d'horrible comme ça. D'où le fait qu'il aillent tous vers l'Ouest (soit-disant) alors que je vais vers l'Est!
Je pars à l'aube et me poste sur la rampe d'autoroute en face du truck stop. Deux heures plus tard et devant l'indifférence des conducteurs et la férocité du froid, je décide de retenter les routiers. Bingo! Melvin va jusqu'à Providence, dans le petit état de Rhode Island, à 80 km au sud de Boston. Il transporte des voitures et devra faire un bon détour par Hartford (dans le Connecticut) pour y décharger les voitures, mais ça me convient. Nous partons vers 10 heures. Melvin travaille pour une compagnie et ne prend pas d’auto-stoppeur d'habitude, mais c'est son dernier jour aujourd'hui, alors tant pis s'est-il dit. Il me fait penser à Jay que j'avais rencontré à New York : malgré un esprit ouvert et une bonne personnalité, il ne connaît quasiment rien du reste du monde. Mon projet et mes histoires d'outre-mer lui paraissent à tomber par terre et je m'amuse donc pas mal à lui en faire profiter. Nous passons finalement plus de temps sur la route qu'estimé et je n'ai pas pris le temps de prévenir Natasha, à tord... Lorsque je l'appelle vers 17h elle me sermonne qu'elle a attendu toute la journée alors que je lui avais proposé de ne pas se préoccuper de mon arrivée : j'aurai très bien pu l'attendre moi ! S'en suit donc une course avec le temps pour arriver le plus tôt possible après avoir décharger les voitures du camion de Melvin ! Il se prend au jeu et s'investit comme moi dans l'observation des cartes et essaie de me dégoter un train de Providence à Boston. On doit en plus prendre en compte les routes où les camions peuvent circuler et trouver la gare... Il me dépose finalement vers 20h sur la sortie d'autoroute la plus proche de la gare et je le remercie pour tout ce qu'il a fait spontanément pour moi, en lui promettant un coup de fil et la suite de mes aventures avec Natasha.
Courant à présent avec mon lourd fardeau sur le bord de l'autoroute en direction de la gare, je ne garde plus en ligne de mire que l'horaire du prochain train qui devrait partir dans 3 minutes maintenant... Comme toujours dans ces moments là, la providence me jette mon habituel coup de pouce: "Hey man, you need a ride?" me lance un type qui s'arrête devant moi. Il va à Boston ce soir pour Halloween! Quel coup de chance! Nous passons d'abord chez lui pour qu'il se déguise et j'y prend même une douche... Matt a 40 ans mais paraît n'en avoir que 25, il a habité 20 ans à Hawaï, il est passionné de saut en parachute et son secret est apparemment le Yoga. Nous roulons à présent dans le centre ville de Providence et commentons sans s'abstenir les costumes extravagants que portent les jeunes dans la rue, alors qu'il faut rappeler l'autre... Matt se propose de lui parler au téléphone pour éviter tout malentendu lorsque je le lui dresse un tableau de la situation et de la personne! Quelle classe! De son "zen" omniprésent et pareil à un gentleman, il rattrape incroyablement le coup en proposant à Natasha d'aller ensemble à sa fête d'Halloween. Une heure et de sympathiques conversations existentielles plus tard, nous sonnons à sa porte et la rencontrons enfin le sourire aux lèvres, après presque 42 heures de stop quasi-ininterrompues. Pas de record en auto-stop du coup, mais après de telles péripéties je suis satisfait... "Pas besoin d'une médaille pas vrai!?!"
| Top ↑ |